Autonomie féminine

Les femmes ont beaucoup perdu en 68

« Les femmes ont beaucoup perdu en 68 »

C’est par ce commentaire désabusé et sentencieux
que mon ostéopathe m’accueillit le jour où je m’écroulais dans son cabinet, épuisée physiquement et nerveusement et victime d’un sérieux burn out, explosion résultat d’une équation toute simple :

activité plein temps + enfants en bas âge + maison en travaux = burn out

Rien que du très banal, en somme.

A travers le brouillard de mon exténuation, ma réaction fut quand même vive : « qu’est-ce que c’est que ce réac ? ».

Puis, apprenant que sa femme exerçait le métier d’avocate, j’ai prudemment cogité. Ce pourrait-il qu’il ait raison ?

Je n’en ai jamais reparlé avec lui, chacun son métier. Il exerçait le sien à la perfection et il réussit l’exploit de me rétablir en moins de 18 mois. Ma réflexion propre a abouti à la conclusion que :

Objectivement, je préfère être dans la situation qui est la mienne en 2008 :

j’ai le droit de vote (depuis 1944 officiellement et depuis 1945 en pratique),

je peux travailler et ouvrir un compte bancaire sans l’autorisation de mon mari (depuis 1965) ;

la contraception m’est autorisée (depuis la loi Neuwirth de 1967) et l’avortement aussi (avec la Loi Weil acquise de haute lutte en 1975).

Bref, c’est dingue, je dispose du droit de disposer de mon propre corps !

Et même, j’exerce une autorité parentale depuis la loi sur l’autorité parentale de 1970, qui ébranle la « puissance paternelle ».

En plus, on me bichonne depuis 1974 avec un Secrétariat d’Etat à la Condition Féminine, puis en 1981, un Ministère des Droits de la Femme. Discrètement dilué en 1993 dans le ministère des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville.
 
Summum du luxe, la notion de « salaire féminin » est supprimée depuis belle lurette. « À travail égal, salaire égal » s'inscrit dans la législation française. Plusieurs lois rappellent ce principe en 1972, 1983 et 2005.

Royal, non ?

Sauf qu’en pratique, les effets de ces attentions ressemblent fort à un effet boomerang :

En tant que femme française, mon salaire est de 30% moins élevé que celui de mon collègue masculin à activité et diplômes égaux d’après les dernières études INSEE.

Si je suis mariée, ça génère pour moi 7 heures de travail hebdomadaire en plus.

Si mini stroumphette est malade, qui reste à la maison pour la soigner ? A l’arrivée d’un 2è ou 3è enfant, qui va passer à temps partiel ? Monsieur ou Madame ?

Au retour du travail, qui va attaquer une deuxième journée lavage – repassage – baby sitting – comptes – courses – repas ? 

Réflexion faite, c’est donc bien ça. J’ai gagné le droit de faire des études, d’avoir un poste à responsabilité (ou non) et de disposer de mon corps (officiellement, car je dois aussi gérer la pression sociale) et de l’autorité parentale.

Mais je dois être parfaite, partout, tout le temps, combative et féminine de concert – d’où les « trucs pour survivre » de ce blog -. J’accède malgré tout très difficilement aux postes clés, que ce soit dans la société civile ou politique.

Finalement, le bon vieux slogan de « Moulinex libère les femmes » reste tout à fait d’actualité.

Alors, révolutionnaire pour les femmes, mai 68 ? ça reste à démontrer !

Le gain des femmes dans le combat pour leur libération depuis 40 ou 50 ans ressemble fort à un cadeau empoisonné.

Mais rassurons-nous : c’est pire ailleurs !









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S
Parfois, j'aimerais être revenue à avant 68: je suis à mon compte, et j'ai l'impression que je vais faire ma première crise cardiaque à 25 ans.<br /> Parce que même si je n'ai pas d'enfants, mon mari qui travaille "à l'extérieur" estime que puisque je suis à la maison, j'ai le temps... J'ai encore du travail pour lui faire admettre que ce n'est pas le cas.<br /> Et gamine,j'ai toujours préféré jouer avec un établi+outils qu'avec des poupées (j'ai eu mes premières barbies par accident vers 11 ans)... mais maintenant, je suis le plombier + électricien + mécano+informaticien de la maison, en plus du boulot + tâches ménagères + potager de 500m². Alors, quand l'Homme râle parce que le balai n'est pas passé, j'explose, et je me rêve femme au foyer dans les années 40: entièrement prise en charge par un mari conscient de ses responsabilités...et libre de remplir mon rôle social en allant voir les voisins et petits vieux de temps en temps.<br /> <br /> Si avec ça, je ne suis pas une desperate, je ne sais pas!
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G
<br /> Coucou Sarah,<br /> Oui, je peux comprendre cette sensation ! Aujourd'hui, chacune doit trouver son équilibre entre tous ces éléments et franchement, ce n'est pas facile ! <br /> Bienvenue dans le club des desspérate - maispas tant que ça (c'est à dire qui essaient de faire au mieux en fonction de la situation...) <br /> <br /> <br />
R
le problème est en réalité que tout les grands changements qui se sont amorcés pour les femme à partir des années 60 n'a pas du tout été suivi d'un changement de mentalité en profondeur.<br /> par exemple, si les mères continuent à éléver leur garçon comme des pacha, ils seront des maris pacha et donneront à leur fils l'image d'un homme pacha.
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G
<br /> Eh oui. Moi j'ai été élévée par une mère féministe qui m'offrait des trains électriques (avec lesquels j'adorais jouer) en plus des poupées. Et aujourd'hui se pose la question : comment vais-je<br /> bien pouvoir offir des poupées à mini stroumph qui ne jure que par les trains et des trains à mini strouphette qui ne jure que par les poupées ? Je n'ai pas trouvé de réponse !<br /> <br /> <br />
B
Oui, c'est bien pire ailleurs et ça fait relativiser, même si gagner moins que les hommes pour le même job, et par là même avoir une retraite moindre également, ça fout les boules !<br /> <br /> Gros bisous,<br /> Bool
Répondre
G
<br /> Oui, tiens, je n'avais pas pensé à la retraite. C'est pourtant d'actualité...<br /> Bisous et bon week end, Bool.<br /> <br /> <br />