24 Avril 2017
Cela fait 13 ans que vous travaillez à ce poste de chargée de communication, au fond ce n’est pas si mal, parfois un peu répétitif mais vous n’avez pas lieu de vous plaindre. Pourtant… il y a comme un détail qui vous dérange, ce collègue, John, arrivé il y a trois ans dans votre service et qui gère la communication des meilleurs projets. Bien sûr, il est sérieux, efficace, tout comme vous l’êtes en fait, pourtant aucun doute qu’il va récupérer ce poste de responsable que vous convoitez depuis si longtemps.
A ce stade, une question pertinente à se poser est « qu’est-ce que la discrimination sexuelle ? » Vous allez me dire : « c’est quand une personne est traitée moins favorablement qu’une autre en raison de son sexe ! » Dans l’idée, vous avez raison, on pourrait en effet définir la discrimination comme le fait de distinguer et de traiter différemment quelqu’un ou un groupe de personnes, par rapport à un ensemble de personnes plus grand, et à partir de critères énumérés par la loi. On peut aussi l’aborder sous l’angle d’un traitement spécifique défavorable en raison du sexe, et entrainant une rupture dans l’égalité des droits et/ou des chances.
Plus concrètement, la loi prévoit qu’aucune personne ne peut :
La discrimination peut aussi s’appréhender sous la forme du harcèlement. Ainsi, au niveau de l’Union européenne (directive 2006/54 du 5 juillet 2006), il est affirmé que « le harcèlement et le harcèlement sexuel sont contraires au principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes et constituent une discrimination fondée sur le sexe aux fins de la présente directive ». En droit français, le harcèlement sexuel est également considéré comme une forme de discrimination depuis une loi du 27 mai 2008, n°2008-496. Enfin, pour terminer ce tour d’horizon de ce qu’est la discrimination, citons une décision de la Cour de cassation (chambre sociale, 24 avril 2013) affirmant que « l'entrave dans le déroulement de la carrière du salarié et l'ambiance homophobe du lieu de travail sont de nature à laisser présumer une discrimination en raison de l'orientation sexuelle ».
Attention cependant, Une différence de traitement est tout à fait envisageable dès lors qu’elle répond à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et à la condition que ces différences de traitement poursuivent un objectif légitime et soient proportionnées vis-à-vis de ce dernier !
Maintenant que vous cernez un peu mieux ce qu’est la discrimination, peut-être cela vous a conforté dans votre idée que vous en êtes victime. Ce que vous souhaitez savoir, c’est comment changer les choses, comment faire cesser la discrimination, voire, comment obtenir réparation de votre préjudice ?! Il est sans doute plus sage d’observer deux étapes à ce niveau, bien que vous puissiez directement passer à la seconde.
Il y a des faits qui parlent d’eux-mêmes, il parait évident que vous faite l’objet d’un traitement moins favorable que vos collègues masculins à même niveau de compétence et même poste. Néanmoins, parce que vous n’êtes pas certaine que cette différence de traitement ne soit pas justifiée aux yeux de la loi et/ou parce que vous pensez que ce problème peut être réglé à l’amiable, vous choisissez dans un premier temps de prendre votre courage à deux mains et d’aller parler à votre supérieur hiérarchique ou à votre employeur. Mais que lui dire ? Inutile de tourner autour du pot, vous avez par exemple constaté que vos demandes de formation sont systématiquement rejetées alors que vos collègues masculins en bénéficient régulièrement. Ce qui implique qu’ils se voient confier des tâches plus importantes, cela se reflétant sur leur salaire.
Bref, soyez calme mais déterminée, énumérez les différents faits qui vous laissent penser que vous êtes discriminée et prenez le temps d’écouter les explications de votre supérieur. Il doit être en mesure de vous expliquer en quoi cette différence de traitement est essentielle et déterminante pour l’entreprise, en quoi elle poursuit un objectif légitime et en quoi elle y est proportionnée. Il y a alors trois principales issues.
Votre supérieur ou employeur peut :
Si finalement rien n’est fait, si les explications sont ridicules ou que vous n’en obtenez pas du tout, il y aura à nouveau deux options :
Les faits sont là, vous êtes victime de discrimination, vous en avez déjà informé votre employeur, cela n’a aucunement réglé le problème, sans doute est-il de mauvaise foi… Néanmoins vous savez que la loi est de votre côté et vous souhaitez obtenir justice. En fait, à ce niveau, vous avez deux objectifs : faire cesser la discrimination et obtenir réparation du préjudice que vous avez déjà subi.
Vous devez savoir qu’un employeur qui réalise une discrimination est passible à la fois de sanctions civiles et pénales :
Mais comment demander justice ? Sachez que deux types de recours vous sont ouverts :
Votre principal problème va néanmoins être celui de la preuve. Comment convaincre le juge que vous êtes bel et bien victime de discrimination sexuelle ? Vous devrez en effet apporter une preuve de chaque fait que vous avancez. Cette preuve pourra se faire par tout moyen (attestations, mails, documents etc…). Pour davantage d’information ou des exemples, consultez cette fiche sur la preuve du harcèlement moral. Si vous disposez de suffisamment d’élément pour laisser penser au juge qu’une discrimination a effectivement été commise, mais que vous n’apportez cependant pas de preuves concrète, une mesure d’instruction pourra toutefois être ordonnée. C’est-à-dire que le juge pourra demander une enquête afin de recueillir les preuves qui lui manquent. Cependant, le recruteur ou employeur qui serait accusé d’avoir opéré une discrimination pourra renverser les preuves déposées contre lui en démontrant au juge que la décision qui lui est reprochée était justifiée par des éléments objectifs, étrangers à toute discrimination.
Vous pensez être victime de discrimination sexuelle, vous vous retrouvez dans les critères énumérés par la loi, vous décidez alors de réagir. Il est conseillé dans un premier temps d’en discuter avec sa hiérarchie afin de résoudre le problème à l’amiable ou de constater que toute différence de traitement qu’il y ait, cette dernière est nécessaire et justifiée par des éléments objectifs. Si néanmoins ce n’est pas le cas, vous pourrez exercer un recours en justice, mais attention, vous devrez être en mesure d’apporter des preuves à l’appui de ce que vous affirmez.
Article rédigé par :
Timothé Bureau est chef de projet pour le site www.coindusalarie.fr, groupe Legal’Easy. Diplômé en droit des affaires de l’université d’Angers, Timothé Bureau est spécialisé en droit social et rédige quotidiennement des articles pour aider les salariés à connaitre leurs droits et à les comprendre. |